Sartre et le concept de néantisation
Sartre et la néantisation : une clé pour comprendre la liberté humaine
Quand on entend le mot "néantisation", on pourrait croire à un concept abscons, réservé aux initiés de la philosophie. Et pourtant, derrière ce mot un peu intimidant, Jean-Paul Sartre cache une idée profondément libératrice : celle de notre pouvoir d’être libres.
Le néant, mais pas comme vous l’imaginez
Il faut d'abord balayer un malentendu : la néantisation chez Sartre n’a rien à voir avec le néant au sens courant, c’est-à-dire l’absence totale, le vide cosmique ou un trou noir existentiel. Le néant, chez Sartre, c’est une opération de la conscience.
La conscience comme pouvoir de dire "non"
Dans L’Être et le Néant, Sartre développe une idée centrale : la conscience n’est jamais simplement "dans le monde", elle est toujours en décalage. Elle ne se contente pas de constater, elle peut nier, refuser, imaginer autre chose. C’est ce que Sartre appelle la néantisation : la conscience peut "néantiser", c’est-à-dire mettre à distance ce qui est, dire "ce n’est pas cela que je veux", ou "ce n’est pas moi".
Par exemple, si je suis employé de bureau mais que je rêve de devenir artiste, je peux me dire : "Je ne suis pas qu’un employé". Ce geste intérieur, ce refus d’adhérer totalement à ce que je suis dans les faits, c’est déjà un acte de liberté. Je mets à distance ce que je suis maintenant pour ouvrir la possibilité d’un autre avenir. Je ne suis pas ce que je suis.
La néantisation rend possible la liberté
C’est ici que Sartre est révolutionnaire : ce pouvoir de néantiser, c’est le cœur même de notre liberté. Sans lui, nous serions enfermés dans notre condition, comme les choses sont enfermées dans ce qu’elles sont. Une pierre est une pierre. Mais un humain n’est jamais totalement ce qu’il est : il peut se dépasser, se projeter, devenir autre.
La néantisation, c’est le pouvoir de dire "non" au donné, de ne pas se contenter du réel. Elle rend possible le choix, le projet, le changement.
Et moi, alors ?
Si vous vous êtes déjà surpris à penser : "Je ne veux plus être comme ça", ou "Je vais changer ma vie", vous avez fait l’expérience de la néantisation. Ce n’est pas juste une fuite ou une rêverie, c’est le mouvement même de la liberté humaine, tel que Sartre l’a pensé.
Alors oui, le mot peut sembler technique, mais l’idée est incroyablement concrète : nous sommes capables de refuser, imaginer, choisir. Et c’est cette capacité qui fait de nous des êtres libres – et responsables.
En résumé
- La néantisation, chez Sartre, n’est pas le néant physique, mais une fonction de la conscience.
- Elle permet de mettre à distance le réel, de dire non, et donc d’agir librement.
- La liberté est inséparable de cette capacité à ne pas être enfermé dans ce que l’on est.
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